n° 05 – bulletin de l’Organisation des Recherches sur les Environnements Invisibles
Actualité : chantier paléophonique à Chalon-sur-saône.
Chalon sur Sound ?
Chalon, sans accent circonflexe ni champagne, mais en bonne terre bourguignonne : Chalon-sur-Saône… ou sur Sound ? Chalon, berceau de la photographie de Niepce et Daguerre et, nos lecteurs fidèles s’en souviennent, des projets de phonographie de Nadar, à l’origine du Paléophone de Charles Cros !

Chalon, sans accent circonflexe ni champagne, mais en bonne terre bourguignonne : Chalon-sur-Saône… ou sur Sound ? Chalon, berceau de la photographie de Niepce et Daguerre et, nos lecteurs fidèles s’en souviennent, des projets de phonographie de Nadar, à l’origine du Paléophone de Charles Cros !
Après Noisy-le-Sec (que nos estimés collègues d’outre-Manche traduisent trop fréquemment par « Bruyant-the-Dry » – en dépit de la récurrente et légendaire humidité de cette charmante localité dionysienne, bien connue pour son pittoresque centre de tri ferroviaire et son Centre de Création des Arts de la Rue), l’O.R.E.I. ouvrira les portes de son chantier de fouilles à Chalon, dans l’ancien collège de la citadelle.
Le collège de la Citadelle est fermé depuis de très nombreuses années. Non point pour désamiantage, mais pour y effectuer des fouilles archéologiques et archéophoniques avant qu’une rénovation et remise aux normes n’effacent à jamais toute trace de sons fossiles. Ces fouilles étant toujours en cours (d’école) et le site étant protégé, il n’a pas été possible d’ouvrir la cour de l’établissement aux performances d’artistes pendant la période de « Chalon dans la rue ». En revanche, en accord avec le festival, l’O.R.E.I. accueillera exceptionnellement le public au cours de visites de chantier accessibles à tous, sur réservation.
Le collège de la Citadelle est fermé depuis de très nombreuses années. Non point pour désamiantage, mais pour y effectuer des fouilles archéologiques et archéophoniques avant qu’une rénovation et remise aux normes n’effacent à jamais toute trace de sons fossiles. Ces fouilles étant toujours en cours (d’école) et le site étant protégé, il n’a pas été possible d’ouvrir la cour de l’établissement aux performances d’artistes pendant la période de « Chalon dans la rue ». En revanche, en accord avec le festival, l’O.R.E.I. accueillera exceptionnellement le public au cours de visites de chantier accessibles à tous, sur réservation.
Visites publiques du chantier:
le 24 juillet à 15h et 18h
et
le 25 juillet à 11h, 15h et 18h
Sur le terrain, nos chercheurs ont en effet pu constater une évidente « porosité acousmatique » des murs de cette ancienne maison de maître et détecter un nombre conséquent de résurgences acoustiques fossiles.
C’était prévisible, le professeur Michelet a pu, grâce à son D.I.P.A. (Détecteur Individuel Portatif d’Acousmates), capter et partager avec les visiteurs plusieurs traces récentes de pratiques musicales. Mais Serge Vauthron a pu déceler et rendre audibles, par lecture photophonique, des bribes de conversations et autres sons quotidiens laissés par l’ancien propriétaire des lieux (le directeur de l’entreprise métallurgique Vallourec, et sa famille) dans ce qui était à l’origine le salon.
Malheureusement, la multiplicité et la diversité des acousmates (sons d’instruments de musique en grande majorité) mêlées à l’activité sonore du festival, le tout amplifié par la nature même du lieu, ont rendu difficile l’identification et le classement des R.A.F., et ce malgré la participation active des habitants de la ville qui ont rejoint l’équipe de l’O.R.E.I. lors de l’ouverture publique des chantiers les 16 et 17 mai.
Aussi, le mystère reste-t-il entier et nous ne savons pas avec certitude, à ce stade des recherches, ce que conserve réellement le conservatoire…
Sans doute une autre mission sera-t-elle nécessaire. Ce sera avec plaisir que l’équipe de l’O.R.E.I. retournera à Noisy-le-Sec, dont les habitants se sont révélés accueillants, curieux et disponibles ; les écrits enthousiastes laissés par ces derniers dans le livre d’OREI, témoignent en effet de l’émotion qu’ils ont pu ressentir en ayant accès à quelques vestiges de la mémoire sonore de leur ville.
Nous remercions tout spécialement Jean-Philippe de Jussieu, directeur du conservatoire, et son équipe, sans qui ces fouilles n’auraient pas été possibles.
Emilien de la Roche-Jonquourt, sous-marinier détaché de la « Royale » (la Marine Nationale dans l’armée française), est spécialiste de l’identification des résurgences acoustiques fossiles (R.A.F.). Chercheur rigoureux et indispensable sur un terrain de fouilles paléophoniques, il nous révèle le secret de ses recherches, qu’il mène le plus souvent à l’aide d’un simple stéthoscope.
le 24 juillet à 15h et 18h
et
le 25 juillet à 11h, 15h et 18h
Attention, compte tenu de la fragilité des acousmates, le nombre de visiteurs est strictement limité.
Nous vous remercions à l’avance de réserver vos places auprès de la billetterie du festival à partir du 8 juillet.
Plus d’infos: www.chalondanslarue.com
Nous vous remercions à l’avance de réserver vos places auprès de la billetterie du festival à partir du 8 juillet.
Plus d’infos: www.chalondanslarue.com
La vie des chantiers : l’O.R.E.I. au conservatoire de Noisy-le-Sec
Du 13 au 17 mai, pendant les « Rencontres d’Ici et d’Ailleurs », l’équipe de l’O.R.E.I. ouvrait un chantier de fouilles sur le site du conservatoire de Noisy-le-Sec. Il s’agissait de vérifier si ce bâtiment recélait effectivement les qualités acoustiques d’un « tympan géant » tel que M. Baudot, en son temps, l’avait pressenti (voir bulletin n°4)* .

C’était prévisible, le professeur Michelet a pu, grâce à son D.I.P.A. (Détecteur Individuel Portatif d’Acousmates), capter et partager avec les visiteurs plusieurs traces récentes de pratiques musicales. Mais Serge Vauthron a pu déceler et rendre audibles, par lecture photophonique, des bribes de conversations et autres sons quotidiens laissés par l’ancien propriétaire des lieux (le directeur de l’entreprise métallurgique Vallourec, et sa famille) dans ce qui était à l’origine le salon.
Malheureusement, la multiplicité et la diversité des acousmates (sons d’instruments de musique en grande majorité) mêlées à l’activité sonore du festival, le tout amplifié par la nature même du lieu, ont rendu difficile l’identification et le classement des R.A.F., et ce malgré la participation active des habitants de la ville qui ont rejoint l’équipe de l’O.R.E.I. lors de l’ouverture publique des chantiers les 16 et 17 mai.
Aussi, le mystère reste-t-il entier et nous ne savons pas avec certitude, à ce stade des recherches, ce que conserve réellement le conservatoire…

Sans doute une autre mission sera-t-elle nécessaire. Ce sera avec plaisir que l’équipe de l’O.R.E.I. retournera à Noisy-le-Sec, dont les habitants se sont révélés accueillants, curieux et disponibles ; les écrits enthousiastes laissés par ces derniers dans le livre d’OREI, témoignent en effet de l’émotion qu’ils ont pu ressentir en ayant accès à quelques vestiges de la mémoire sonore de leur ville.
Nous remercions tout spécialement Jean-Philippe de Jussieu, directeur du conservatoire, et son équipe, sans qui ces fouilles n’auraient pas été possibles.
* suite aux alertes des riverains et usagers du conservatoire, qui affirmaient avoir entendu des sonorités sans pouvoir en situer l’origine, le Moulin Fondu avait fait appel à l’O.R.E.I. pour tenter de confirmer et relever ces acousmates. Une étude préalable d’un ancien plan de la ville avait fait apparaître la coupe anatomique d’une oreille, et situait le conservatoire dans la région du tympan.
Entretien avec une OREI d’or !

– Comment avez-vous intégré l’équipe de l’O.R.E.I. ?
– C’est pour mes qualités en tant qu’ « oreille d’or » que j’ai été affecté aux recherches archéophoniques de l’O.R.E.I. : en effet, dans la marine on apprend à identifier plus de 5000 bâtiments, uniquement à l’oreille. Dans un sous-marin, vous avez pu remarquer qu’il n’y a pas de hublot, on ne voit rien lorsqu’on est en immersion. Le sonar nous indique s’il y a présence d’un bâtiment, mais on ne peut pas savoir si c’est un ami ou un ennemi. Or, l’eau a la propriété de transmettre les ondes acoustiques bien mieux que l’air. Dans l’air, le son se propage péniblement à 340 m/s, et s’affaiblit rapidement jusqu’à devenir inaudible ; alors que dans l’eau, il va beaucoup plus vite (1500 m/s), beaucoup plus loin, et il semblerait même que l’eau en conserve la mémoire dans ses molécules. Les baleines peuvent ainsi communiquer à des distances considérables.
– Comment devient-on « oreille d’or » ?
– Déjà quand j’étais petit, je pouvais reconnaître le bruit de toutes les mobylettes du quartier : la Flandria de Gérard (il avait une façon spéciale de passer en troisième), le 104 de Mickey (avec le patinage interminable de l’embrayage automatique), la Honda de Nico … Naturellement, ça prend quelques années d’études et d’éducation de l’oreille. La première chose qu’on apprend dans la marine, c’est à faire la différence entre les sons mécaniques et les sons naturels. Entre un moteur de sous-marin et un banc de crevettes par exemple. Je ne plaisante pas, notre problème N°1, c’est les bancs de crevettes, dont l’incessant caquetage nous brouille l’écoute. L’océan n’est pas du tout ce « monde du silence » dont parle le commandant Cousteau : il n’y a pas plus bruyant que le monde sous-marin. Ici, à la surface, nos crevettes ce serait plutôt… Je vous laisse deviner tout ce qui, dans notre environnement, constitue un « bruit » qui nous masque le « signal » ; choisissez vous-même, car tout dépend de ce que vous cherchez à entendre !
– Parlez-nous de votre méthode de travail…
– J’ausculte systématiquement les sites à l’aide d’un stéthoscope médical. Comme vous savez, les résurgences acoustiques fossiles (R.A.F.) peuvent se présenter à tout moment et en tout lieu, et disparaître tout aussi inexplicablement. Elles sont volatiles et éphémères. Pour cela, un outil comme le stéthoscope, portatif, autonome et léger s’avère extrêmement pratique. Et puis, le stéthoscope, c’est tout le contraire du baladeur, du lecteur mp3, du ipod : au lieu de vous isoler du monde en consommant toujours les mêmes programmes que vous avez recopié ou téléchargé, vous partez à la découverte d’un monde inoui, à côté duquel vous passez tous les jours. Pas de droits d’auteurs, pas de redevance, pas de loi Hadopi, pas de hit-parade, pas de vote payant par SMS ! Pas de fil ! Pas de piles ! Ce stéthoscope fonctionne aujourd’hui, il fonctionnera encore dans 100 ans, et il vous permet d’entendre des sons qui sont là depuis peut-être… des milliers d’années ! C’est pas du durable, ça ?
– C’est pour mes qualités en tant qu’ « oreille d’or » que j’ai été affecté aux recherches archéophoniques de l’O.R.E.I. : en effet, dans la marine on apprend à identifier plus de 5000 bâtiments, uniquement à l’oreille. Dans un sous-marin, vous avez pu remarquer qu’il n’y a pas de hublot, on ne voit rien lorsqu’on est en immersion. Le sonar nous indique s’il y a présence d’un bâtiment, mais on ne peut pas savoir si c’est un ami ou un ennemi. Or, l’eau a la propriété de transmettre les ondes acoustiques bien mieux que l’air. Dans l’air, le son se propage péniblement à 340 m/s, et s’affaiblit rapidement jusqu’à devenir inaudible ; alors que dans l’eau, il va beaucoup plus vite (1500 m/s), beaucoup plus loin, et il semblerait même que l’eau en conserve la mémoire dans ses molécules. Les baleines peuvent ainsi communiquer à des distances considérables.
– Comment devient-on « oreille d’or » ?
– Déjà quand j’étais petit, je pouvais reconnaître le bruit de toutes les mobylettes du quartier : la Flandria de Gérard (il avait une façon spéciale de passer en troisième), le 104 de Mickey (avec le patinage interminable de l’embrayage automatique), la Honda de Nico … Naturellement, ça prend quelques années d’études et d’éducation de l’oreille. La première chose qu’on apprend dans la marine, c’est à faire la différence entre les sons mécaniques et les sons naturels. Entre un moteur de sous-marin et un banc de crevettes par exemple. Je ne plaisante pas, notre problème N°1, c’est les bancs de crevettes, dont l’incessant caquetage nous brouille l’écoute. L’océan n’est pas du tout ce « monde du silence » dont parle le commandant Cousteau : il n’y a pas plus bruyant que le monde sous-marin. Ici, à la surface, nos crevettes ce serait plutôt… Je vous laisse deviner tout ce qui, dans notre environnement, constitue un « bruit » qui nous masque le « signal » ; choisissez vous-même, car tout dépend de ce que vous cherchez à entendre !
– Parlez-nous de votre méthode de travail…
– J’ausculte systématiquement les sites à l’aide d’un stéthoscope médical. Comme vous savez, les résurgences acoustiques fossiles (R.A.F.) peuvent se présenter à tout moment et en tout lieu, et disparaître tout aussi inexplicablement. Elles sont volatiles et éphémères. Pour cela, un outil comme le stéthoscope, portatif, autonome et léger s’avère extrêmement pratique. Et puis, le stéthoscope, c’est tout le contraire du baladeur, du lecteur mp3, du ipod : au lieu de vous isoler du monde en consommant toujours les mêmes programmes que vous avez recopié ou téléchargé, vous partez à la découverte d’un monde inoui, à côté duquel vous passez tous les jours. Pas de droits d’auteurs, pas de redevance, pas de loi Hadopi, pas de hit-parade, pas de vote payant par SMS ! Pas de fil ! Pas de piles ! Ce stéthoscope fonctionne aujourd’hui, il fonctionnera encore dans 100 ans, et il vous permet d’entendre des sons qui sont là depuis peut-être… des milliers d’années ! C’est pas du durable, ça ?
Devenez membre de l’O.R.E.I. ! Une manifestation acousmatique dans votre quartier ? Un son d’une espèce protégée en voie d’extinction ? Contribuez à la recherche sur les environnements invisibles en nous envoyant vos témoignages… Et lors des visites de nos chantiers de fouilles, n’oubliez pas de signer le Livre d’ORei !
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